La famille Micolon

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Le STO

Le Service du Travail Obligatoire (STO) fut, durant l’occupation de la France par l’Allemagne nationale-socialiste, la réquisition et le transfert vers l’Allemagne de centaines de milliers de travailleurs français contre leur gré, afin de participer à l’effort de guerre allemand que les revers militaires contraignaient à être sans cesse grandissant (usines, agriculture, chemins de fer, etc.). Les personnes réquisitionnées dans le cadre du STO étaient hébergées dans des camps de travailleurs implantés sur le sol allemand.

L’Allemagne nazie imposa au gouvernement de Vichy la mise en place du STO pour compenser le manque de main-d'œuvre dû à l’envoi des soldats allemands sur le front russe, où la situation ne cessait de se dégrader. De fait, les travailleurs forcés français sont les seuls d’Europe à avoir été requis par les lois de leur propre État, et non pas par une ordonnance allemande. C'est une conséquence indirecte de la plus grande autonomie négociée par le gouvernement de Vichy comparativement aux autres pays occupés, qui ne disposaient plus de gouvernement propre.

Un total de 600 000 à 650 000 travailleurs français furent acheminés vers l'Allemagne entre juin 1942 et juillet 1944. La France fut le troisième fournisseur de main-d'œuvre forcée du Reich après l'URSS et la Pologne, et le pays qui lui donna le plus d'ouvriers qualifiés.

Fritz Sauckel, surnommé le « négrier de l'Europe », est chargé le 21 mars 1942 d'amener de la main-d'œuvre de toute l'Europe par tous les moyens. Il s'intéresse particulièrement à la France. Sa nomination est à peu près concomitante avec le retour au pouvoir de Pierre Laval. Jusqu'alors, moins de 100 000 travailleurs français volontaires sont partis travailler en Allemagne. Le refus d'envoyer 150 000 ouvriers qualifiés a été l'une des causes de la chute de Darlan. Au cours des années 1942 et 1943, Sauckel use d'intimidation et de menaces pour remplir ces objectifs. Face à lui, Laval, tour à tour négocie, temporise et obtempère, si bien que les relations entre les deux hommes sont tumultueuses, Sauckel louant Laval pour sa coopération ou le condamnant pour son obstruction. On appelle « actions Sauckel » les exigences de main-d'œuvre formulées par Sauckel entre le printemps 1942 et le début de 1944.

Le travail obligatoire est institué en Europe de l'Ouest par un « Anordnung » de Sauckel du 7 mai 19424. Sauckel demande 250 000 travailleurs supplémentaires avant la fin du mois de juillet. Face à cette exigence, Laval recourt à sa méthode favorite qui consiste à négocier, gagner du temps et chercher des moyens d'échanges. C'est ainsi qu'il en vient à proposer le système de la « Relève » consistant à libérer un prisonnier de guerre pour trois départs en Allemagne de travailleurs libres ; cette « Relève » est instituée et annoncée dans un discours du 22 juin 1942. Dans le même discours, Laval proclame « je souhaite la victoire de l'Allemagne ». Dans une lettre envoyée le même jour au ministre allemand des Affaires étrangères, Ribbentrop, Laval place cette politique de la « Relève » dans le cadre d'une participation de la France à l’effort de guerre allemand contre le bolchevisme, au travers de l’envoi de travailleurs

Le manque de succès de cette mesure (17 000 volontaires seulement à fin août) sonne le glas du volontariat. Le 22 août 1942, une directive de Sauckel précise qu'il faut désormais recourir au recrutement forcé. Du point de vue de Sauckel, la « Relève » a été un échec puisque moins de 60 000 travailleurs français sont partis en Allemagne à la fin du mois d'août. Il menace alors de recourir à une ordonnance pour réquisitionner la main-d'œuvre masculine et féminine, ordonnance qui ne peut s'appliquer qu'en zone occupée. Laval négocie l'abandon de l'ordonnance allemande au profit d'une loi française concernant les deux zones. Ceci conduit à la loi française du 4 septembre 1942 qui introduit la conscription obligatoire pour tous les hommes de 18 à 50 ans et pour les femmes célibataires âgées de 21 à 35 ans. Cette loi de coercition est évidemment impopulaire, et au sein même du gouvernement, quatre ministres auraient manifesté leur opposition. En décembre 1942, l'objectif de 250 000 hommes de la première action Sauckel est atteint.

Toutefois, la réquisition forcée d'ouvriers, gardés par des gendarmes jusqu'à leur embarquement en train, suscite de nombreuses réactions hostiles. Le 13 octobre 1942 éclatent les incidents d'Oullins, dans la banlieue lyonnaise. On écrit sur les trains « Laval assassin ! ». Le gouvernement est forcé de reculer en zone sud si bien qu'au 1er décembre 1942, seuls 2 500 ouvriers requis ont en tout et pour tout quitté la zone Sud.

Après qu'Hitler ordonne, le 15 décembre 1942, le versement dans l'armée de 300 000 ouvriers allemands, Sauckel exige, le 1er janvier 1943, qu'en plus des 240 000 ouvriers déjà partis en Allemagne, un nouveau contingent de 250 000 hommes soit expédié d'ici la mi-mars. Pour satisfaire cette deuxième « action Sauckel », le 16 février 1943 Pierre Laval, après avoir vainement négocié11, instaure le Service obligatoire du travail (SOT) ; cette dénomination maladroite sujette aux railleries ne subsiste qu'une semaine, elle est rapidement remplacée par « STO ». Les précédentes réquisitions, sous le régime de la « Relève », ne concernaient théoriquement que des ouvriers. Avec la mise en place du STO, le recrutement, de catégoriel, se fait désormais par classes d'âge entières. Les jeunes gens nés entre 1920 et 1922, c'est-à-dire ceux des classes « 1940 », « 1941 » et « 1942 » ont l'obligation de partir travailler en Allemagne (ou en France), s'agissant d'un substitut au service militaire. La jeunesse, dans son ensemble, devient la cible du STO. La classe « 1942 » est la plus touchée, et les exemptions ou sursis initialement promis aux agriculteurs ou aux étudiants disparaissent dès juin. Théoriquement, les jeunes femmes sont aussi concernées mais, par peur des réactions de la population et de l’Église, hormis quelques cas individuels, elles ne sont pas touchées par le STO. Parmi les requis de la deuxième « action Sauckel », on compte 24 000 jeunes hommes des Chantiers de la Jeunesse, du dernier contingent de la classe « 1942 ».

Le 15 mars, au cours d'une réunion de prières réunissant 4 000 jeunes, à Roubaix, église Saint-Martin, le cardinal Liénart, évêque de Lille, exhorte les jeunes à y aller (le Journal de Roubaix titre : « ce serait de la lâcheté de ne pas obéir [...] ») ; une semaine plus tard, le cardinal expose sa pensée en trois points : l'occupant outrepasse ses droits, on peut donc désobéir sans péché, mais le devoir de charité — si je ne pars pas, un autre partira à ma place — peut inciter à partir.

Certaines victimes sont prises dans des rafles de la Milice et de la Wehrmacht. Le PPF de Jacques Doriot met quant à lui sur pied, en 1944, des Groupes d'Action pour la Justice Sociale (sic) chargés de traquer les réfractaires contre de l'argent, et d'enlever la main-d'œuvre jusqu'en pleine rue.

Au total, 600 000 hommes partent entre juin 1942 et août 1943. Laval aura mis l’inspection du travail, la police et la gendarmerie au service des prélèvements forcés de main-d’œuvre et de la traque des réfractaires au Service du Travail Obligatoire. À la seconde « action Sauckel » succède une troisième : le 23 avril, les Allemands présentent de nouvelles demandes, il leur faut 120 000 ouvriers en mai et 100 000 autres en juin. Le 6 août 1943, il en exige 500 000 supplémentaires. Ces objectifs ne sont jamais atteints car des réfractaires de plus en plus nombreux échappent aux réquisitions, et finalement, ce sont les Allemands eux-mêmes qui mettent un terme, de fait, aux demandes de Sauckel. Le 15 septembre 1943, le ministre de l'armement du Reich Albert Speer conclut un accord avec le ministre du Gouvernement Laval, Jean Bichelonne, soustrayant de nombreuses entreprises travaillant pour l'Allemagne à la réquisition de Sauckel. Les hommes sont protégés mais l'économie française dans son ensemble est intégrée à celle de l'Allemagne. De façon formelle, à côté de la nouvelle politique de Speer, Sauckel tente tant bien que mal de continuer la sienne de prélèvement de main-d'œuvre vers l'Allemagne. Ainsi, une quatrième « action Sauckel » lancée en 1944 s'avère être un fiasco complet.


Date de création : 12/02/2021 16:31
Dernière modification : 12/02/2021 16:31
Catégorie : Quelques infos sur nos origines
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